Le vertige des images II : Jules Maciet et ses amis

2011, Année Jules Maciet...
La Bibliothèque du MAD lui rend hommage à travers 4 expositions :
• Jules Maciet, Le vertige des images I, du 11 janvier au 11 mars
• Bernard Ollier, Extension du domaine Maciet, du 17 mars au 14 mai
• Jules Maciet, Le vertige des images II, du 30 mai au 29 juillet
• Matthew Bakkom, Face to face, du 12 septembre au 4 novembre

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Jules Maciet à Château-Thierry, 1906
© DR

Si Jules Maciet est le principal fournisseur d’images de la collection qui prit son nom, à la Bibliothèque du MAD, il entraîne dans la construction de son œuvre ses proches : ses amis Raymond Koechlin et Louis Metman ; son cousin, le peintre Aman-Jean ; des membres des arts décoratifs : les présidents Georges Berger et François Carnot ; des membres du conseil d’administration : Hugues Krafft, Henri Beraldi ; des collectionneurs : Emile Peyre… dont les contributions varient suivant les séries et reflètent les goûts et les activités de chacun. Raymond Koechlin donne des images concernant les ivoires, la sculpture gothique, le Japonisme (sujet partagé par Louis Metman) ; le nom de Henri Beraldi, bibliophile historien de l’estampe, est très présent dans la série « Ecriture-imprimerie » ; les photographies prises et rapportées par Hugues Krafft de ses voyages sont dispersées dans les séries asiatiques de la série « Costume » ; le legs d’Emile Peyre vient enrichir les collections de gravures anciennes ; les images données par Aman-Jean sont dues à des artistes contemporains ; Georges Berger donne des invitations, des menus et des documents en rapport avec les expositions universelles, et François Carnot des documents rares et originaux.

La Bibliothèque du MAD fut créée en 1864 par l’Union centrale des Beaux-arts appliquées à l’industrie (qui deviendra Union centrale des Arts décoratifs en 1882, Les Arts Décoratifs en 2006), une association fondée par des industriels de l’art pour maintenir dans ce domaine la suprématie française face à la montée en puissance de l’Angleterre. La Bibliothèque faisait partie de leur programme d’éducation des artisans, au même titre que la création d’un musée rétrospectif, de cours spéciaux et l’organisation d’expositions « présentant à l’étude de belles applications de l’art à l’industrie ». Située Place des Vosges, elle était à proximité du faubourg Saint-Antoine et des artisans à laquelle elle était destinée.

Les Amis de l’Art japonais, dîner du 18 mai 1908
Luigi Chialliva
© S. Nagy

Quand Jules Maciet commence en 1887 à constituer sa collection, il la conçoit comme un outil permettant l’accomplissement des objectifs des fondateurs : permettre aux artisans d’acquérir les connaissances nécessaires à la création du beau dans l’utile, le slogan de l’UCAD, et de posséder des notions artistiques nécessaires au raisonnement esthétique. Dans sa conférence de 1884 sur l’art dans l’industrie, Georges Berger, qui faisait partie du Conseil d’administration de l’Union Centrale depuis 1877 et en deviendra le président en 1890, explique cette nécessité en insistant sur la liaison très étroite entre la beauté formelle et la perfection technique. D’après lui, aider à la formation du goût c’est participer au progrès des techniques, car comprendre le style de l’objet qu’il fabrique permet à l’ouvrier de mieux travailler. Il n’est plus un simple exécutant qui répète machinalement des gestes, mais un véritable artisan qui participe à la beauté finale de l’objet.

Jeune fille, Japon, 1882
H. Krafft
© DR

Jules Maciet mène une entreprise de classification des savoirs et des savoirs-faire par l’image et crée un musée de papier dans lequel les artisans pourront se promener et où chacun trouvera matière à enrichir son travail. En effet, si dès l’ouverture de la Bibliothèque des albums d’échantillons textiles, de papiers-peints, de dessins et une collection de moulages ont permis aux lecteurs d’avoir accès directement à des recueils de modèles, Jules Maciet va constituer une collection encyclopédique beaucoup plus large où il sera possible de trouver tout à la fois des reproductions de dessus de portes Louis XV, le dernier modèle automobile de Panhard et Levassor, des Dianes antiques, des verres de Lalique, des motifs de toiles de Jouy ou de kimonos japonais, des palais italiens ou les jardins de l’empereur de Chine. Une collection où les plantes, les animaux, les saints et les métiers sont classés par ordre alphabétique, où l’on peut suivre l’évolution du siège à travers les siècles, toutes les déclinaisons des produits de l’imprimerie, et se tenir au courant de la mode européenne dernier cri ou celle des peuples barbares, en passant par les costumes des brésiliens au XVIe siècle ou des islandais du 18e. C’est un univers total où chacun peut se constituer sa propre culture. D’après son ami Raymond Koechlin, Maciet « tenait en matière d’art l’éducation livresque pour détestable et déclarait bien haut que ce qu’il savait - et il savait prodigieusement de choses – ce n’était pas dans les livres qu’il l’avait appris mais bien à ouvrir les yeux dans les expositions et dans les musées, et à regarder des gravures et des photographies, érudition sans pédanterie, personnelle, diverse, directe ». Ainsi, selon Jules Maciet, seule la culture forgée librement selon le goût et la sensibilité de chacun est réellement digne d’intérêt et utile à l’épanouissement des artisans.

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