L’exposition

Invitation ardente à partager une connaissance subtile de l’étoffe et les plaisirs visuels qu’elle peut délivrer, l’exposition et l’ouvrage ont été voulus pour donner à penser, susciter des envies et livrer des clés pour agir. Ils semblent devoir faire date, à en juger par la fascination qu’ils ont exercée.

Trop enraciné dans l’expérience quotidienne de chacun pour que l’on ait songé à l’observer méthodiquement, le triple jeu de la lumière, du textile et du regard n’avait jamais été étudié dans son ensemble. Et pourtant ! Effet du choix des fils, de la texture, du dessin, de la mise en volume, les tissus se métamorphosent de façon stupéfiante lorsque changent la direction de la lumière, celle du regard et l’environnement, ou encore selon le rapport d’éclairement entre la face vue, la face cachée et l’arrière-plan visible par transparence. Ils s’illuminent ou s’éteignent, basculent de l’opaque au transparent, la couleur éclate, change ou s’efface, les superpositions de textures génèrent des géométries aléatoires. Selon l’échelle et la distance d’observation, la texture domine ou disparaît. Savoir briller est tout un art, un satin noir et un satin blanc inversent leurs valeurs. De simples voilages aux effets différentiels peuvent transfigurer le jeu de la lumière du soleil selon la latitude, l’heure et la saison, et jouer sur notre psychisme par les stimuli lumineux qu’étudie la chronobiologie.

La première section de l’exposition présente les principales familles optiques où peuvent être classés les effets visuels directionnels de la lumière sur le textile : l’ombre et la lumière, l’opaque et le transparent, le mat et le brillant, le visible et le caché ; elle révèle aussi les propriétés visuelles de grandes familles textiles : taffetas, satin, damas, velours, maille, dentelle.

La seconde section propose des mises en situation de costumes anciens et d’aujourd’hui, en tenant compte de l’usage qui est fait du vêtement (de la lingerie aux tenues de ville et aux robes de soirée, en passant par les robes pour la campagne, sans oublier les tenues de travail actuelles les plus techniques), et de leur fondement réglementaire ou symbolique dans le cas des uniformes militaires ou des ornements liturgiques. Echelonnés du XVe siècle à l’année 2000, les exemples choisis offrent aussi une riche matière aux amateurs d’histoire de la mode et du textile, qu’il faut maintenant revisiter.

L’ouvrage est un livre riche, à déguster par page ou double page, où les photographies, de l’auteur pour la plupart, voulues belles et intriguantes, se répondent et font l’objet chacune d’un commentaire détaillé. Les macrophotographies révèlent un univers ignoré de qui n’a pas connu le bonheur des soieries sous la loupe. Sociologues, historiens, praticiens de la mode et du textile, du bois, du verre et du métal, coiffeurs, architectes, décorateurs, designers, éclairagistes, gens de théâtre et de cinéma, photographes, plasticiens, et nous sommes tous plus ou moins l’un ou l’autre, chacun, jusqu’aux paysagistes – un champ de lavande fonctionne comme un tissu côtelé –, trouvera de quoi renouveler son regard et féconder ses travaux, textiles ou non, par ces observations, toujours très accessibles, qui pourtant questionnent aussi des scientifiques spécialistes de l’image de synthèse, de la lumière, de la couleur et de la perception visuelle et s’appliquent encore à la réticulation des façades d’immeubles-miroirs.

Le colloque

La nouveauté du sujet et l’essor des recherches sur l’apparence visuelle des matériaux dans les laboratoires publics et dans l’industrie ont conduit le commissaire de l’exposition à coordonner un colloque scientifique, une première au MAD : « Jouer la lumière : le textile, la lumière et l’œil », 12-13 novembre 2001, nef de l’aile de Marsan, en collaboration avec le Centre français de la couleur dans le cadre des XVIIIe Rencontres internationales « Image et science ». Les actes sont consultables à la Bibliothèque du MAD, cote MD 1598.

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