Porte-clés Cémoi, Miko, Mi-Cho-Ko, anonyme, vers 1960
Plastique, métal
© Jean Tholance

A la fin du XIXe siècle la publicité naissante ouvre un nouvel espace de collecte aux amateurs qui voient dans ces témoignages de la vie quotidienne un « curieux chapitre d’histoire » de la société où tout est nouveau. Avec la société de consommation émergeante, des techniques commerciales s’élaborent pour séduire, inciter l’achat et fidéliser les clients par tous les moyens. Tous les produits, toutes les marques, tous les commerces distribuent d’innombrables petits objets ludiques ou utilitaires.

Lorsque dans Les Illusions perdues, Honoré de Balzac mentionne avec étonnement « les affiches devinrent si originales qu’un de ces maniaques appelé collectionneur possède un recueil complet des affiches parisiennes », il aborde la problématique de ces amateurs de curiosités incongrues et modestes. D’abord considérées comme des rassemblements d’objets mineurs, faits par des excentriques sur lesquels ironisent les collectionneurs « sérieux », les premières collections d’affiches deviennent très vite les symboles de l’avant-garde.

Ces articles, usuels pour la plupart, tels des éventails, des briquets ou des cendriers, font l’objet de collections amusantes, surprenantes, hétéroclites. Ils ont ainsi été rassemblés autour d’une marque telle Menier, Perrier ou Kub, d’un événement telle la Coupe du Monde de foot ou le passage à l’an 2000, d’un thème comme le cinéma et la musique, ou d’une cible privilégiée comme les enfants. Ce type de collection obéit aux mêmes ressorts que la collection d’objets précieux, coûteux et « nobles ». L’amateur passionné est motivé par le même plaisir de chiner, de dénicher l’objet manquant ou rare, d’identifier, de sélectionner, d’échanger, d’accumuler, et de classer, parfois jusqu’à l’obsession.

Face à ce panorama infini d’objets d’intérêt, les collectionneurs de publicité ont éprouvé le besoin de forger des noms « bizarres » pour identifier leurs collections. En les nommant, ils ont ainsi créé une spécialité et ont donné à leurs collections ses lettres de noblesse. On devient copocléphile lorsque l’on collectionne les porte-clés, boxoferophile lorsqu’il s’agit de boîtes en fer, ou Yabonophile, si notre intérêt porte exclusivement sur les produits Banania. En parallèle apparaissent des clubs ou associations, des salons ainsi qu’une presse spécialisée, destinés à faire connaître, documenter, classer, coter, échanger ces objets de collection d’une extrême variété, et qui suit les modes de chaque époque.

Eventail, Bally, d’après Leonetto Cappiello, 1933
Bois, métal, papier, lithographie couleur
Don Anne et Michel Lombardini, 2011
© Jean Tholance

L’exposition accueille le visiteur avec une profusion d’éventails aux murs et dans des vitrines. Fabriqués à des milliers d’exemplaires de 1890 jusqu’à la fin de la 2de guerre mondiale, ils ont ensuite été remplacés par de nouveaux objets publicitaires et leur production devient confidentielle après les années 1950. Ils vantent des marques de champagne, de parfum mais aussi des lieux de villégiature, les grands magasins, les cafés et les hôtels parisiens, sans oublier les expositions universelles de 1867 à 1900. Pour certaines pièces, il a été fait appel à des artistes de renom tels Clérice, Chéret ou Ogé pour les années 1900 puis à Cassandre, Colin, Cappiello ou Gruau pour la période 1930-1950. Devenu publicitaire, cet objet frivole et amusant en apparence, synonyme d’élégance, se trouve mis à la portée de toutes les classes sociales.

Le parcours se poursuit avec des salles consacrées aux collections par type d’objet. Rassembler de façon exclusive les chromos, les porte-clés, les cendriers, les buvards, les télécartes ou les sacs publicitaires relève d’une forme aigüe de « collectionnite », la « monomanie ». Cette « monomanie » se focalise également sur les marques. Quatre grandes entreprises sont mises en avant, Michelin, Saint-Raphaël, Banania et Dunlop, pour illustrer cette tendance.

Les collectionneurs se sont également passionnés pour les objets publicitaires qui décoraient les magasins, nommés jusque dans les années 1960 « panneaux réclame » puis devenus de nos jours « PLV » (publicité sur le lieu de vente). Ce sont des présentoirs, des cartons ou des panneaux publicitaires lumineux et des factices destinés aux cafés ou aux épiceries.

Affiche Coca-Cola light, Jean Paul Gaultier, agence Wolkoff et Arnodin, Stéphane Sednaoui, 2012
Papier, offset couleur
© Jean Tholance

L’exposition met également en lumière l’apport des collectionneurs d’affiches qui ont enrichi les musées. Deux « affichomanes », Georges Pochet en 1901 et Roger Braun en 1941, offrent ainsi au MAD des ensembles très complémentaires de plusieurs centaines d’affiches de la fin du XIXe siècle au début du XXe siècle : des affiches françaises de grandes signatures tels De Feure, Manet, Bonnard et des exemplaires rares pour Georges Pochet, des affiches étrangères de Stuck, Hohenstein... pour Roger Braun.

A ces deux collections fondatrices se sont ajoutés régulièrement les dons d’amateurs d’affiches de cinéma, d’œuvres de Cassandre, mais aussi d’éditions publicitaires comme les catalogues commerciaux et les BD.

Cette promenade étonnante à travers l’univers publicitaire d’objets insolites et curieux ne peut que surprendre et interpeller le visiteur. Il sera peut-être aussi touché, voire ému, car qui n’a pas éprouvé un jour, petit ou grand, le besoin de conserver une jolie boîte à biscuits recyclée en boîte à trésors, un éventail, un pichet ou bien un cendrier publicitaire ?

De nos jours, au-delà de leur qualité artistique, ces objets modestes témoignent de ces petits moments d’histoire de la publicité, à laquelle nous participons tous par imprégnation et dont la petite musique résonne au détour de l’un d’eux.

Réalisez une vidéo pour l’exposition Pub Mania !

Avis aux collectionneurs de publicité ! Dans le cadre de l’exposition Pub Mania. Ils collectionnent la publicité, nous vous proposons de réaliser une vidéo d’environ deux minutes (2 min) dans laquelle vous répondrez aux questions suivantes :
• Que collectionnez-vous ?
• Depuis combien de temps ?
• Quel a été le point de départ/l’élément déclencheur ?
• Quel intérêt trouvez-vous à cette collection (plaisir, partager, montrer, accumuler, chiner...) ?
• Quelle est votre pièce préférée, pourquoi ?

Réalisez une vidéo pour l’exposition Pub Mania !
Modalités et règlement
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Selon les indications inscrites à l’article 4 du règlement, vous pourrez déposer votre vidéo d’un poids maximum de 2 Go à l’adresse suivante : http://extranet.lesartsdecoratifs.fr/filez
en utilisant l’identifiant : pubmania et le mot de passe : pubmania

Une sélection sera projetée pendant l’exposition.
Les auteurs des films sélectionnés en seront informés par l’organisateur.

2 COMMENTAIRES
  • Ravie
    4 septembre 2013 14:49, par Sylvie

    Une exposition qui m’a permis de retrouver quelques souvenirs de mon enfance, ça m’a émue de redécouvrir toutes ces petites madeleines de Proust !

  • collectionneuse de buvards publicitaires
    29 mai 2013 17:39, par Betty

    ravie de trouver enfin un lieu pour respirer un air de nostalgie,suis une collectionneuse de buvards publicitaires (environ 200) qui datent de 60 ans,collection interrompue en raison d’un support devenu obsolete.Dommage !

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