Paravent « Les Cagnas »

Jean Dunand (1877–1942)
Paris, vers 1921
Acajou, laque, métal
Six feuilles
H. 180 ; l. 50 cm (chacune)
Dépôt du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, 1923
Inv. MIN B.A. ss n°(57)
© ADAGP, Paris. Photo : Les Arts Décoratifs

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Traité comme une peinture moderne, ce paravent représente un paysage d’hiver des côtes d’Argonne, situé au voisinage des bois de la Grurie, dans les Ardennes. Le village étagé à flanc de colline, la composition circulaire des habitations basses, aux toits foncés et faiblement pentus, les arbres dénudés, la gamme chromatique – noir, blanc, beige – donnent de ce paysage du nord de la France une transcription japonisante raffinée. L’année 1912 marqua un tournant dans la carrière de Jean Dunand car il s’initia aux techniques de la laque avec le grand laqueur japonais Seizo Sugawara qui avait auparavant travaillé avec Eileen Gray. Ce fut une association à bénéfice réciproque : Dunand transmit à Sugawara la technique des incrustations de métaux précieux s’apparentant au travail du dinandier. À partir de 1921, la laque devint son matériau de prédilection et il l’utilisa sur le métal comme sur le bois. Il aborda le mobilier par le travail de la laque, qu’il appliquait à des meubles aux formes simples comportant de grandes surfaces planes comme le paravent. Le succès de ses œuvres de laque alla croissant, grâce aux expositions à la galerie Georges-Petit qui réunissait le groupe d’amis de Dunand : Jean Goulden, Paul Jouve et François Louis Schmied. Les Cagnas, qui comptent parmi ses premières créations, furent présentés dans la grande salle d’exposition de la galerie en décembre 1922. C’est une œuvre personnelle pour laquelle le créateur ne s’est pas adjoint la collaboration d’un autre artiste. Souvent, en effet, il réalisait des panneaux pour les meubles d’autres décorateurs (Legrain, Printz, Ruhlmann) ou travaillait à partir de cartons exécutés par Jean Lambert-Rucki ou Georges Jouve (par exemple pour le paravent à deux feuilles Léopard et Cobra présenté aux côtés des Cagnas à la galerie Georges-Petit). Le paravent dont le lointain ancêtre, l’« otevent », servait de garniture de chambre au XVIIIe siècle, avait pour vocation d’abriter les personnes frileuses contre les vents coulis. Au XXe siècle, sa fonction décorative semble l’emporter sur son usage utilitaire ; toutefois certains architectes décorateurs comme Eileen Gray ou Jean Dunand s’en servirent pour recomposer l’espace dans un appartement au confort moderne. Pierre Chareau alla plus loin encore en agençant les volumes à l’aide de cloisons mobiles à volets qui, coulissant sur des rails, reprenaient le principe du paravent. Autrefois ouvrage de menuisier et de tapissier, le paravent est désormais expression artistique individuelle, œuvre d’artiste-décorateur.

H. A. Jean Dunand. Jean Goulden, catalogue d’exposition, Paris, galerie du Luxembourg, 1973.
Félix Marcilhac, Jean Dunand, vie et œuvre, Paris, Éditions de l’Amateur, 1991.

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