Fils unique de Nissim de Camondo et Élise Fernandez, Moïse de Camondo est né à Istanbul en 1860. Arrivé en France avec ses parents en 1869, il poursuit ses études au lycée Fontanes (actuel lycée Condorcet) avant de rejoindre son cousin Isaac au sein de la banque familiale. À la mort de ce dernier en 1911, il en prend la direction et finalement ferme l’établissement en 1917.

Il épouse en octobre 1891 Irène Cahen d’Anvers, fille du banquier Louis Cahen d’Anvers et de Louise de Morpurgo qui tient un célèbre salon littéraire et politique. De leur mariage naîtront deux enfants, Nissim en 1892 et Béatrice deux ans plus tard. Malheureusement, leur union ne dure pas : ils se séparent en 1896 et leur divorce est prononcé en 1901. À partir de 1899, Moïse et ses enfants, dont il a la garde, habitent un hôtel particulier rue Hamelin dans le XVIe arrondissement, jusqu’à leur installation en 1913, rue de Monceau.

Caricature de Moïse de Camondo, par Georges Goursat, dit Sem, vers 1904
© MAD, Paris

Personnalité assez secrète, Moïse de Camondo intimide par une certaine raideur et son humour caustique. De haute taille, très élégant, ce gentleman sportif consacre beaucoup de temps à ses loisirs. Adepte du yachting dans sa jeunesse, il a possédé quelque temps un bateau, "le Géraldine", qui croise en Méditerranée. Mais sa véritable passion est pour l’automobile naissante : il conduit ses voitures, Renault, Panhard, Bugatti... Accompagné de son chauffeur-mécanicien, il prend part à des courses comme Paris-Berlin en 1900. Adepte du « tourisme » il parcourt ainsi l’Europe et livre ses réflexions sur ses voyages au Club des Cent dont il est membre depuis 1925.

Excellent cavalier, il s’adonne aussi à la chasse, chasse à tir dans les environs de Senlis où il possède une propriété, "la villa Béatrice" à Aumont, et chasse à courre dans la proche forêt d’Halatte. Il fait partie, comme toute sa famille, de l’équipage "Par Monts et Vallons".

Mais Moïse de Camondo est avant tout un collectionneur. Passionné par le XVIIIe siècle, il affectionne particulièrement l’élégance raffinée qui s’impose dans les dernières années du règne de Louis XV et s’épanouit au règne suivant qui voit le triomphe de l’esthétique néo-classique. Aidé des conseils avisés de Carle Dreyfus, conservateur au musée du Louvre et de Louis Metmann, conservateur au Musée des Arts Décoratifs, Moïse commence sa collection personnelle dès la fin du XIXe siècle, alors qu’il réside rue Hamelin.

Mais c’est à partir de la construction de son nouvel hôtel rue de Monceau que le rythme de ses achats s’intensifie, pour se poursuivre jusqu’à la veille de sa mort. Il fréquente assidûment les grands antiquaires parisiens, Seligmann, Wildenstein, Kraemer, Larcade, Lion, Helft... et achète aussi dans des ventes aux enchères. Patient et tenace, il parvient à réunir des meubles séparés qui faisaient partie d’une même paire. Parfois, il procède à des échanges car sa collection n’est pas figée, toujours à la poursuite d’une perfection idéale du XVIIIe siècle. La demeure inspirée du Petit Trianon qu’il fait construire à partir de 1911 rue de Monceau doit être l’écrin digne de sa collection.

Moïse de Camondo dans sa première voiture, 1895
© MAD, Paris

L’avenir de Moïse de Camondo est assombri par la mort de son fils Nissim, tué en combat aérien en 1917. Après la guerre, l’hôtel s’anime rarement. Les visites sont plutôt réservées aux intimes et aux « initiés ». Moïse consent toujours à recevoir chez lui amateurs et savants qui le demandent, facilitant ainsi études ou recherches.

Au fil des années, l’aspect somptueux et inestimable de cet ensemble s’accentue, rendant toute vie animée incompatible avec la fragilité des meubles et des objets, voire même incongrue dans ces lieux consacrés au souvenir omniprésent de son fils. En effet, Moïse a décidé de vouer son hôtel et ses collections à la mémoire du disparu, trouvant ainsi un moyen de défier l’oubli en provoquant la naissance d’un lieu préservé du temps et de la mort : « le Musée Nissim de Camondo ». Légué à l’Etat en 1935, Moïse en a confié la gestion à l’Union Centrale des Arts Décoratifs (devenu en 2004 Les Arts Décoratifs) dont il était le vice-président depuis 1930.

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