Malgré sa colossale fortune et son train de vie exceptionnel, on sait bien peu de choses sur le baron William Williams Hope. Il naît en 1802, probablement à Amsterdam. Sa mère est la nièce du grand banquier Henry Hope, dont l’établissement était alors célèbre dans toute l’Europe. Son père est un important associé de la banque. À 21 ans, William hérite de celui-ci 60 millions de francs-or, ce qui le place au rang des hommes les plus riches et les plus puissants du continent.
Il s’installe alors à Paris, d’abord rue Neuve-des-Mathurins, puis dans l’hôtel de Monaco, situé 121 rue Saint-Dominique, qu’il achète en 1837. Il transforme radicalement le bâtiment pour en faire l’une des demeures les plus luxueuses de la capitale. Immense, décoré avec faste et abritant une considérable collection, l’hôtel fascine et émerveille. Être invité aux réceptions du baron est l’un des grands honneurs de la vie mondaine parisienne. En 1848, comme pour souligner sa parfaite intégration à la société de la monarchie de Juillet, Louis-Philippe lui accorde la nationalité française. Célibataire, sans descendant, il lègue à sa mort en 1855 tous ses biens à un lointain parent d’Angleterre, qui s’empresse de tout mettre en vente.
Despite his huge wealth and exceptional lifestyle, we know very little about Baron William Williams Hope. He was born in 1802, probably in Amsterdam. His mother was the niece of the banker Henry Hope, whose firm was then famous throughout Europe, and his father was one of the bank’s prime associates. When he was twenty-one, William inherited sixty million francs from his father, making him one of the wealthiest and most powerful men in Europe.
When he moved to Paris he lived first in rue Neuve-des-Mathurins then acquired the Hôtel de Monaco at 121 rue Saint-Dominique in 1837, radically transforming it onto one of the city’s most luxurious residences. The huge mansion’s splendour and the baron’s magnificent collection fascinated and marvelled all. To be invited to one of the baron’s receptions was a great honour amongst the Parisian elite. In 1848, to emphasise his perfect integration into July Monarchy society, Louis-Philippe granted him French citizenship. A bachelor with no heirs, when he died in 1855 he bequeathed his estate to a distant relation in England, who rapidly auctioned all his possessions.
L’hôtel de Monaco que William Hope achète en 1837 à la princesse d’Eckmühl, veuve du maréchal d’Empire Louis-Nicolas Davout, avait été construit en 1774 pour la princesse de Monaco par l’architecte Alexandre-Théodore Brongniart (1739-1813). Le baron ne le trouve cependant pas à son goût et décide d’en revoir complètement les plans et l’aménagement intérieur. Il engage des travaux considérables d’un montant de 7,5 millions de francs, qui sont achevés dès 1841.
La refonte totale de la tuyauterie fait du bâtiment l’un des plus modernes de l’époque en le dotant notamment d’une salle de bain. Le corps du logis est augmenté de deux ailes latérales édifiées par Achille-Jacques Fédel (1785-1860), deuxième prix de Rome en 1813 et ancien élève de Brongniart. La demeure s’étend désormais sur quelque 12 000 m², correspondant aux 131-133, rue Saint-Dominique et aux 15-17, rue d’Iéna.
Le baron Hope inaugure sa nouvelle résidence le 25 avril 1842, en présence des plus grandes familles du royaume : les Rohan, les Gontaut, les Noailles, les La Trémoille, les Richelieu… Il installe ses appartements privés au rez-de-chaussée de l’hôtel tandis que l’on accède aux pièces de réception à l’étage par un escalier d’honneur. A l’extérieur, jardins, serres, bassins, pavillons, et même un manège pour le dressage des trente-cinq chevaux que compte l’écurie, complètent cet ensemble luxueux.
À la mort du baron en 1855, l’hôtel est vendu par adjudication au baron Seillière, qui le lègue à sa fille, la princesse de Sagan. Il est ensuite habité par le grand antiquaire Jacques Seligmann, avant d’être racheté par l’État qui en fait l’ambassade de Pologne en 1936.
The Hôtel de Monaco, acquired by William Williams Hope in 1837 from the Princess of Eckmühl, widow of Louis-Nicolas Davout, Marshall of the Empire under Napoleon, was built for the Princess of Monaco by the architect Alexandre-Théodore Brongniart (1739-1813) in 1774. Not finding it to his taste, Baron Hope completely changed its layout and interior decoration. The mansion’s refurbishment, costing 7.5 million francs, was completed in 1841.
State of the art plumbing and a bathroom made it one of the modern buildings of the period. Two side wings were added, built by the architect Achille-Jacques Fédel (1785-1860), a Prix de Rome laureate in 1813 and a former pupil of Brongniart. The new 12,000 square-metre mansion now extended from 131 to 133 rue Saint-Dominique and 15 to 17 rue d’Iéna.
When Baron Hope inaugurated his new residence on 25 April 1842, his guests included the kingdom’s greatest families, the Rohans, the Gontauts, the Noailles, the La Trémoilles and the Richelieus. His private apartment was on the ground floor, with the main staircase leading up to the reception rooms on the first floor. Outside there were gardens, greenhouses, ornamental ponds, pavilions and even a riding school for his thirty-five horses.
When the baron died in 1855, the mansion was sold at auction to Baron Seillière, who bequeathed it to his daughter, Princesse de Sagan. It was later the home of the great antique dealer Jacques Seligmann, then bought by the State and allocated to the Polish Embassy in 1936.
Achille Jacques Fédel, l’architecte de l’hôtel de Monaco, s’illustre également dans la conception du décor intérieur, lequel se présente comme l’un des premiers exemples d’éclectisme sous la Monarchie de Juillet avec ses pièces de réception traitées dans les styles Louis XIV et Louis XVI et ses appartements privés dans le style néo-Renaissance. Marbres polychromes, stucs, bronzes se déploient sur les cheminées, les linteaux et les plafonds avec une magnificence comparable à celle des plus beaux palais. La peinture des décors est confiée à Philippe Comairas (1803-1875), élève d’Ingres.
En écho à l’éclectisme du décor, les collections déployées dans l’hôtel du baron Hope juxtaposent différents styles anciens. Aux émaux de Limoges et aux faïences italiennes et allemandes ornant le vestibule répondent, sur les murs de l’escalier, des portraits du XVIIe siècle.
Achille Jacques Fédel, the architect who refurbished the Hôtel de Monaco, also took charge of the mansion’s interior decoration. One of the first examples of eclecticism under the July Monarchy, its reception rooms were decorated in the Louis XIV and Louis XVI styles and the baron’s private rooms in the Neo-Renaissance style. Its fireplaces, lintels and ceilings were embellished with polychrome marbles, stucco and bronzes with a magnificence rivalling the most beautiful palaces. The mural decorations were painted by Philippe Comairas (1803-1875), a pupil of Ingres.
The mansion’s eclectic decoration was echoed by Baron Hope’s collections, a mixture of historic styles ranging from the Limoges enamel and Italian and German faience in the hall to the 17th-century portraits on the staircase.
Les boiseries de la chambre à coucher du baron Hope sont remontées au musée des Arts décoratifs au milieu des années 1930, lorsque l’hôtel de Monaco est racheté par l’État au profit de l’ambassade de Pologne.
De style néo-Renaissance, la chambre est décorée d’un plafond à caissons et de lambris peints. Sur ceux-ci, des personnages en costume du XVIe siècle sont représentés dans les arcades à fond or, séparés par des pilastres sculptés. Le foisonnement des ornements végétaux ou les portraits en relief émergeant des médaillons font revivre le vocabulaire de la Renaissance, en particulier les grotesques. Bien que la polychromie actuelle des boiseries ne soit pas d’origine (la dernière remise en couleur datant probablement de leur arrivée au musée), les couleurs sont, à quelques variations près, les mêmes que celles voulues par William Hope.
La chambre comprenait un mobilier très complet d’inspiration Renaissance en bois de courbary (un bois exotique rouge) avec incrustations de cuivre. Elle était densément meublée et comprenait, outre le lit, deux commodes, une armoire à glace, une table de nuit, deux autres tables, cinq fauteuils et quatre chaises.
The panelling in Baron Hope’s bedroom was dismantled and reconstructed in the Musée des Arts Décoratifs in the mid-1930s, when the Hôtel de Monaco was bought by the State to house the Polish Embassy.
The bedroom was decorated with a coffered ceiling and painted panelling in the Neo-Renaissance style, on which figures in 16th-century dress are depicted in arcades on a gold ground, separated by sculpted pilasters. The profusion of plant motifs and the portraits in relief emerging from the medallions revive the ornamental vocabulary of the Renaissance, particularly the grotesques. Although the present colours are not the original ones - they probably date from the panelling’s arrival in the museum - with a few variations they are the same as those wished by William Hope.
The bedroom was densely furnished with Renaissance-style furniture in courbary wood (a red tropical hardwood) with copper inlay. Apart from the bed it included two chests of drawers, a mirrored wardrobe, a bedside table, two other tables, five armchairs and four chairs.
Si les meubles et les objets ici présentés ne sont pas ceux du baron Hope, ils restituent néanmoins avec fidélité l’atmosphère des intérieurs de l’époque. Un vif intérêt pour le Moyen Âge et la Renaissance se manifeste dans les intérieurs français des années 1830. Le cabinet de travail d’Alexandre du Sommerard, dont la collection est à l’origine du musée de Cluny, témoigne de ce goût pour le mélange des objets de toutes les époques. Sur la commode d’Alexandre-Louis Bellangé se mêlent ainsi des grès allemands de la fin du XVIe siècle et des pièces des années 1830, tels la bouteille et la cruche de Jules-Claude Ziegler ou le vase flamand de Claude-Aimé Chenavard. Les candélabres ou les bronzes d’Antoine-Louis Barye s’inspirent des bronzes florentins de la Renaissance.
Contrairement à la Restauration qui privilégiait les bois clairs, un nouveau goût pour les bois sombres comme l’acajou, l’ébène et le poirier noirci, se manifeste dans les années 1830. Par ses entrelacs et sa polychromie, le tapis de Chenavard est un hommage à l’art de la Renaissance. De même, le lit de l’alcôve dessiné par l’ornemaniste Michel Liénard est orné sur la traverse d’une nymphe dans le style de Jean Goujon, grand sculpteur du XVIe siècle. Mais la référence au passé n’enferme nullement les artistes dans une attitude réactionnaire. Ce lit est ainsi un exemple de l’industrie naissante : réalisé en fonte, il était commandé sur catalogue et livré en pièces détachées.
Although the furniture and objects on display did not belong to Baron Hope, they faithfully recreate the atmosphere of contemporary interiors. A keen interest in the Middle Ages and the Renaissance manifested itself in France in the 1830s. Alexandre du Sommerard’s study, whose collection formed the nucleus of the Musée de Cluny, is an example of this taste for mixtures of objects from all periods. On the chest of drawers by Alexandre-Louis Bellangé there is an array of late 16th-century German stoneware and pieces from the 1830s such as the bottle and jug by Jules-Claude Ziegler and the Flemish vase by Claude-Aimé Chenavard. The candelabras and the bronzes by Antoine-Louis Barye were inspired by Florentine Renaissance bronzes.
Unlike the Restoration, which preferred light-coloured woods, a new taste for dark woods such as mahogany, ebony and blackened pearwood emerged in the 1830s. The tracery and polychromy of the carpet by Chenavard is a tribute to the art of the Renaissance. Likewise, the bed in the alcove, designed by the ornamental sculptor Michel Liénard, is decorated with a nymph in the style of the great 16th-century sculptor Jean Goujon. But such references to the past were by no means an expression of a reactionary tendency in art. The bed is an example of France’s developing industry: made in cast iron, it was ordered from a catalogue and delivered in separate pieces.
Curator of the 19th Century Department: Audrey Gay-Mazuel
Curatorial assistant: Julie Ruffet-Troussard
Concept, production, development: Mosquito Emmanuel Rouiller, Arnaud Martin
Furniture design: Avec Vous Design Claire Mouret
Panoramic photographs: Michel Urtado, Stefan Von Laue
Photographs of works: Jean Tholance, Laurent-Sully Jaulmes, Cyrille Bernard
Furniture maker: Tôle concept Philippe Chaouche
All the digital labels in the Period Rooms were produced with funding from the Fondation Bettencourt Schueller.
Conservatrice du département XIXe : Audrey Gay-Mazuel
Assistante de conservation : Julie Ruffet-Troussard
Conception, production, développement : Mosquito Emmanuel Rouiller, Arnaud Martin
Design mobilier : Avec Vous Design Claire Mouret
Photographies panoramiques : Michel Urtado, Stefan Von Laue
Photographies des œuvres : Jean Tholance, Laurent-Sully Jaulmes, Cyrille Bernard
Réalisation mobilier : Tôle concept Philippe Chaouche
Ce cartel numérique et ceux de toutes les Period-Rooms ont été réalisés avec le soutien de la Fondation Bettencourt Schueller.