Jean Prouvé est l’un des pionniers du design et de l’architecture moderne du XXe siècle en France. En prônant une démarche « constructive », il conçoit un mobilier et des édifices selon une esthétique simple et fonctionnelle, avec des matériaux industriels comme l’acier et l’aluminium. Ces idées progressistes résonnent avec les principes de l’Union des Arts Modernes dont il est l’un des membres fondateurs, aux côtés de figures importantes comme Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Charlotte Perriand et Robert Mallet-Stevens, avec qui il effectue d’ailleurs plusieurs collaborations. Après la Seconde Guerre Mondiale, il met sur pied son usine à Maxéville, à proximité de Nancy, et contribue à la politique de reconstruction de cette période. Il réalise notamment du mobilier et des architectures destinées à des fins collectives pour les milieux bureaucratiques et scolaires, dont la Cité Universitaire d’Antony en 1954. S’il est également réputé pour ses maisons préfabriquées, son mobilier est largement diffusé par la Galerie Steph Simon à partir de 1956. Encore aujourd’hui, Prouvé demeure l’un des plus grands designers dans l’histoire de l’architecture et des arts décoratifs.
Le catalogue de la première exposition consacrée à Jean Prouvé, Jean Prouvé Industriel du bâtiment, organisée par l’Union Centrale des Arts Décoratifs en 1964 s’ouvre avec un texte de Le Corbusier, daté du 7 janvier 1964 dont on retient « ...il exprime le temps présent… Il construit et il conçoit… ». Si les préfaciers invités au catalogue louent l’homme, le bâtisseur, le constructeur et le positionnent au premier rang des précurseurs pour avoir révélé les qualités de l’aluminium et porté des programmes architecturaux hardis et révolutionnaires, l’exposition présente avec sobriété et simplicité les maquettes et les études de ce nouveau vocabulaire architectural : la Maison du Peuple et Marché de Clichy en 1938, les maisons métalliques en 1946 et 1949, la maison pour l’abbé Pierre en 1956, la maison tropicale en 1948, le Palais de la Foire de Lille en 1950, l’école de Villejuif en 1956, des bâtiments scolaires évolutifs en 1963…
Alors qu’il reçoit le Grand prix d’architecture de la Ville de Paris en 1982, le musée des Arts décoratifs lui dédie une seconde exposition. Le catalogue, produit par l’École technique supérieure de Genève, sa section d’architecture et son centre de documentation en 1977, est réutilisé pour l’exposition de 1982. Tel un hommage, tant au catalogue que dans l’exposition, le travail de Prouvé, allant d’avant 1930 à 1976, rassemblé sur une toile de fond biographique est illustré par de nombreux documents photographiques prêtés par Jean Prouvé lui-même. En 1982, il est important d’approfondir la connaissance de son œuvre et de sa personnalité et de démontrer de nouveau que Prouvé fut convaincu de la faisabilité de réaliser un habitat pour tous, celui qui s’harmonise avec l’évolution industrielle.
« S’il pense, dessine et compose l’architecture à partir des dispositifs techniques et des détails de sa fabrication, s’il construit de nombreux bâtiments autant qu’il fabrique du mobilier métallique en série, Jean Prouvé qui choisit d’être de son temps et sans compromis, incarne aux yeux de Le Corbusier celui qui représente d’une manière singulièrement éloquente le type du “constructeur” […] Je veux dire par là qu’il est indissolublement architecte et ingénieur, à vrai dire architecte et constructeur … .
Tout en expérimentant et en s’appropriant toutes les techniques du métal (pliage, assemblage..), Jean Prouvé conçoit et met au point de nouveaux éléments constitutifs du vocabulaire architectural : ossature, poteau, poutre, portique intérieur ou axial, shed, toiture coque, béquille, mur-rideau… Force est de constater que la construction et ses procédés, c’est bien l’idée constructive de Prouvé, ébauchée dès 1933 et issue de sa formation d’ouvrier d’art en ferronnerie, qui aboutit à l’architecture. »
Du métal, Jean Prouvé en connaît intimement les qualités. S’il utilise l’aluminium en architecture pour sa résistance, son inaltérabilité, sa légèreté et ses facilités de montage et de fabrication en grande série, il se tourne vers la tôle d’acier pliée et emboutie pour la réalisation de ses meubles. De nombreux modèles associant bois et tôle d’acier sont représentatifs de la collection du Musée des Arts Décoratifs : le mobilier conçu pour la résidence universitaire d’Antony, les chaises dites Standard, les fauteuils de bureau et les tables et bureaux courbes Compas. Caractéristique du trait Prouvé, mais inhabituelle dans l’univers du mobilier, la terminologie de piétement Compas que l’on a pu comparer au pas de danseuse correspond à une évolution dans la fabrication en grande série.
Au-delà d’être léger et élégant, le système des pieds Compas équipe des typologies de meubles différentes. Cette série menée sous le signe du confort et de la fonctionnalité s’impose pleinement quant à sa réelle capacité d’adaptabilité. Et c’est à Steph Simon, galeriste et marchand parisien, éditeur et distributeur exclusif du mobilier de Jean Prouvé à partir de 1947, que le Musée des Arts Décoratifs s’adresse pour enrichir la collection design en 1966 et en 1968 par le bureau Direction galbé et les deux bureaux Compas, créés en 1953 et édités en 1956.
Jean Prouvé est l’un des pionniers du design et de l’architecture moderne du XXe siècle en France. En prônant une démarche « constructive », il conçoit un mobilier et des édifices selon une esthétique simple et fonctionnelle, avec des matériaux industriels comme l’acier et l’aluminium. Ces idées progressistes résonnent avec les principes de l’Union des Arts Modernes dont il est l’un des membres fondateurs, aux côtés de figures importantes comme Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Charlotte Perriand et Robert Mallet-Stevens, avec qui il effectue d’ailleurs plusieurs collaborations. Après la Seconde Guerre Mondiale, il met sur pied son usine à Maxéville, à proximité de Nancy, et contribue à la politique de reconstruction de cette période. Il réalise notamment du mobilier et des architectures destinées à des fins collectives pour les milieux bureaucratiques et scolaires, dont la Cité Universitaire d’Antony en 1954. S’il est également réputé pour ses maisons préfabriquées, son mobilier est largement diffusé par la Galerie Steph Simon à partir de 1956. Encore aujourd’hui, Prouvé demeure l’un des plus grands designers dans l’histoire de l’architecture et des arts décoratifs.
The catalogue of the first exhibition devoted to Jean Prouvé, Jean Prouvé Industriel du bâtiment (Jean Prouvé Industrialist of the Building), organized by the Union Centrale des Arts Décoratifs in 1964 started with a text by Le Corbusier, dated 7 January 1964 in which he states “…he expresses the present time.. he builds and he conceives…” The invited preface writers of the catalogue praised the man, the builder, the constructor and his position among the top ranking precursors for having revealed the qualities of aluminium and developed tough and revolutionary architectural programmes, while the exhibition presented soberly and simply the models and studies of this new architectural vocabulary: the Maison du Peuple (House of the People) and the Clichy Market in 1938, the metallic houses in 1946 and 1949, the house for the Abbé Pierre in 1956, the tropical house in 1948, the Palais de la Foire (Fair Palace) of Lille in 1950, the school of Villejuif in 1956, evolving school buildings in 1963, etc.
When he received the Grand Prize in architecture of the City of Paris in 1982, the Musée des Arts Décoratifs devoted a second exhibition to him. The catalogue produced by the Higher Technical School of Geneva, its architecture section and documentation centre in 1977 was reused for the exhibition of 1982. Like a tribute, both in the catalogue and in the exhibition itself, the work of Prouvé, going from before 1930 to 1976, brought together against a biographical background is illustrated by many photographs lent by Jean Prouvé himself. In 1982, it was important to deepen knowledge of his work and his personality and to show again that Prouvé was convinced of the feasibility of creating housing for all, which harmonises with industrial evolution.
If he thinks, draws and composes architecture from technical systems and details of its manufacture, if he constructs many buildings as much as he mass produces metallic furniture, Jean Prouvé who chooses to be of his time and without compromise, incarnates in the eyes of Le Corbusier the person who represents in a uniquely eloquent way the archetype of the “constructor” […] What I mean by this is that he is indissolubly architect and engineer, as a matter of fact, architect and constructor…”
While experimenting and appropriating all the techniques relating to metal (bending, assembling, etc.) Jean Prouvé created and perfected new components of architectural vocabulary: framework, stud, girder, interior portal frame, saw-tooth roof, shell roof, upright, curtain wall… It is clear that construction and its processes, it is in fact Prouvé’s constructive idea, sketched from 1933 and resulting from his training as an ironworker, which culminated in architecture.
Jean Prouvé knew the qualities of metal intimately. If he used aluminium in architecture for its resistance, its indestructibility, its lightness and its ease of mounting and mass production, he adopted galvanized steel, folded and pressed, for the production of his furniture. Many models combining wood and galvanized steel are representative of the collection of the Musée des Arts Décoratifs: the furniture designed for the Antony university housing scheme, chairs called Standards, desk chairs, and tables and desks, Compas. Characteristic of Prouvé’s style but rare in the world of furniture, the form of the Compas base, when has been compared to a dancer’s step corresponds to an evolution in manufacturing for mass production.
Beyond being light and elegant, the Compas leg system is mounted on different types of furniture. This series for which comfort and functionality were essential, stood out for its real capacity of adaptability. And Musée des Arts Décoratifs made contact with Steph Simon, a Parisian gallery owner and dealer, publisher and exclusive distributor of the furniture of Jean Prouvé from 1947 to enrich its design collection in 1966 and in 1968 with the curved Direction desk and the two Compas desks, created in 1953 and produced in 1956.
Conservatrice en chef du département Moderne et contemporain :
Dominique Forest
Conservatrice du département XXe-XXIe siècles : Cloé Pitiot
Assistantes de conservation : Marianne Brabant, Louise Curtis
Chargée d’études documentaires : Laurence Bartoletti
Conception, production, développement : Mosquito Emmanuel Rouiller, Arnaud Martin
Design mobilier : Normal Studio
Photographies panoramiques : Michel Urtado
Photographies des œuvres : Jean Tholance, Laurent-Sully Jaulmes, Cyrille Bernard