Les deux plus grosses donations, Georges Pochet en 1901 et Roger Braun en 1941, constituent la base du fonds ancien et la justification de la création d’un musée de l’affiche au MAD en 1978. De même que les grandes collections privées de peinture viennent enrichir les musées français, les collections d’affiches intègrent le patrimoine national. A Paris, l’institution qui s’impose pour la conservation de ces collections est l’Union Centrale des Arts Décoratifs, devenue Les Arts Décoratifs en 2005 qui joue un rôle de pionnière dans tant de domaines de l’art.
Georges Pochet (1843-1901) est un industriel, il gère la manufacture familiale de céramique. Il est le fils du bibliophile Pochet-Deroches. Sa collection compte plusieurs centaines d’affiches, en général parfaitement conservées, en grande partie entoilées ou bordées d’un papier fort selon les normes de l’époque. Composée essentiellement d’affiches françaises, elle comprend toutes les pièces importantes, de nombreux tirages spéciaux d’affiches destinés aux collectionneurs, les divers états d’une même affiche, des exemplaires portant des signatures autographes. Sélection rigoureuse selon divers critères de qualité : affiches de peintres, dont quatorze Toulouse-Lautrec, renom de l’affichiste (plus de cent Chéret), rareté (une centaine d’affiches de librairie). La reconstitution de l’histoire de cette collection est particulièrement difficile. Mais des recherches récentes permettent de dresser un portrait de cet important collectionneur.
Roger Braun (1863-1941), ancien notaire, ancien officier, bibliophile, avait souhaité qu’à sa mort, ses collections (livres, estampes, albums, journaux satiriques, menus, affiches) complètent les grandes collections publiques, selon leur spécificité. C’est ainsi que la Bibliothèque du MAD reçut en 1941, en legs sa collection d’affiches, pour compléter celle de Georges Pochet. Collectionneur méthodique, Braun est l’auteur, entre autres, d’une précieuse bibliographie de l’affiche, publiée en 1907 dans le Bulletin de la Société Archéologique du Vieux Papier, dont il a été un membre très actif jusqu’à sa mort. Sa collection (environ mille sept cents affiches) très internationale, compte un grand nombre d’affiches américaines, anglaises, belges, italiennes, autrichiennes, ce qui est l’une des caractéristiques de la collection des Arts Décoratifs. Il semble que les critères de sélection retenus par Roger Braun ne soient pas seulement les qualités artistiques des œuvres, mais plutôt leur valeur documentaire.
Le deuxième âge d’or de la collection d’affiches correspond à l’entre-deux-guerres qui voit émerger dans le paysage de la publicité française une nouvelle génération d’artistes, proches des cubistes, membres de l’Union des Artistes Modernes, théoriciens à la recherche de « l’expression graphique de l’idée » selon les termes de Jean Carlu. Surnommés « les mousquetaires » Cassandre, Jean Carlu, Paul Colin et Charles Loupot relancent, par leurs créations, véritables manifestes d’art contemporain, la mode de la collection d’affiches.