À l’origine, ce buste représente une esclave noire dont l’allure altière semble défier le statut. Elle porte des boucles d’oreilles en bronze doré, dites créoles, seul bijou alors autorisé aux femmes esclaves dans les Antilles françaises. Si l’identité de cette femme reste inconnue, l’inscription sur le piédouche fait référence à son affranchissement, en application du décret d’abolition de l’esclavage du 4 février 1794 décidée par la République française, alors réunie en Convention nationale. Si le modèle de cette sculpture fut réalisé par Houdon avant même cette date, elle incarne depuis le visage d’une liberté nouvelle dans ce bronze virtuose de Thomire. Pendant longtemps cette œuvre emblématique a été connue sous le titre de « Buste de négresse », ainsi que la sémantique du XVIIIe siècle l’imposait, provenant de l’espagnol ou du portugais, negro « noir ». Aujourd’hui ce titre devenu à la fois choquant et inacceptable a été changé pour celui de « buste de femme noire » afin de rendre pleinement à cette œuvre sa noblesse, son originalité et sa modernité.
Ce buste a été réalisé d’après un groupe qui ornait une fontaine du jardin du duc d’Orléans à Monceau (actuel parc Monceau) : une servante noire en plomb (disparue) versait de l’eau d’une rivière sur le corps d’une baigneuse en marbre blanc (aujourd’hui dans les collections du Metropolitan Museum de New York, inv. 14.40.673). Ce groupe avait été exposé par Houdon au Salon de 1783.
Le modèle en plâtre de ce buste est conservé au musée de Soissons. Un exemplaire en bronze, de petite dimension, figure au Musée des Arts Décoratifs de Paris (legs Carle Dreyfus, inv. 37261), musée auquel est rattaché le Musée Nissim de Camondo depuis 1935.