La salle à manger

Trois ou quatre fois par an, Moïse de Camondo recevait jusqu’à trente convives dans sa somptueuse salle à manger. Fin mai-début juin, le déjeuner « Louvre » réunissait des conservateurs et des membres du Conseil des musées nationaux tandis qu’au déjeuner « Marsan » étaient conviés tous les administrateurs du conseil de l’Union Centrale des Arts décoratifs dont il était vice-président depuis 1930. Au mois de juin, le comte de Camondo donnait également un déjeuner pour le Club des Cent, un cercle de fins gourmets, dont il était membre depuis 1925.

La table dressée dans la salle à manger
La table dressée dans la salle à manger
© Sophie Motsch

La table de la salle à manger était alors somptueusement dressée avec deux de ses services du XVIIIe siècle, l’un en porcelaine de Tournai à décor polychrome de bouquets de fleurs datant des environs de 1760 et l’autre en porcelaine de Chantilly aux fleurs bleues des années 1770-1775. Pour orner sa table, Moïse de Camondo n’hésitait pas à utiliser des pièces d’orfèvrerie spectaculaires comme ce pot à oille et son plateau en argent réalisés vers 1770-1771 par Jacques-Nicolas Roëttiers de la Tour. Ce dernier compte parmi les orfèvres les plus prestigieux du XVIIIe siècle, fournisseur de la cour de Louis XV et de Catherine II de Russie. Ce pot à oille d’une paire fait partie du service offert par l’impératrice à son favori le comte Orloff.

Cette année, les assiettes en porcelaine de Sèvres du service à décor d’oiseaux, d’après L’Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, parue de 1771 à 1786 sont à l’honneur exceptionnellement. Toutefois, il faut noter que Moïse de Camondo ne l’utilisait pas même pour de grandes occasions en raison de sa fragilité mais l’avait merveilleusement mis en valeur en concevant dès l’origine un cabinet de porcelaine où il est exposé.

Les couverts à poissons placés à l’extérieur de l’assiette sont une invention du XIXe siècle.

Quelques rares menus de déjeuners pour les invités, entre 1930 et 1935, nous renseignent sur le déroulement du service et les différents plats qui se suivent d’une manière très conventionnelle : un hors-d’œuvre froid ou chaud, un relevé de poisson, une entrée (viande ou volaille), puis le rôti ou un plat en gelée accompagné d’une salade et suivi d’un légume.

À la fin du repas, on ne sert pas de fromage mais des chester cakes, des ramequins, des condés (entremets froids à base de riz et de fruits pochés) et des paillettes au parmesan toujours suivis d’une glace, bombe ou parfait, ou le plus souvent, comme en Turquie, un granité aux fruits.

Ces éléments sont les seuls dont nous disposions pour reconstituer une table dressée, car le linge de maison, les services de table, la batterie de cuisine et les vêtements des garde-robes avaient été transmis à Béatrice de Camondo.

La reconstitution de cette table n’aurait pu être réalisée sans le généreux soutien de maisons prestigieuses, Puiforcat a donné les couverts en argent massif « Vauban », Saint-Louis, les verres et carafes en cristal du service « Trianon » créé en 1834 et toujours produit par la manufacture. La nappe et les serviettes sont un don de la société D. Porthault.

La salle des gens

À l’occasion des fêtes de fin d’année, la salle à manger des domestiques dite « salle des gens » est décorée de houx, de plus, des oranges et une bûche de Noël en cire, réalisées par Ewa Jacobs, participent de l’ambiance festive.

La table dressée dans la salle des gens
La table dressée dans la salle des gens
© Sophie Motsch

La pièce, simplement peinte en blanc au-dessus d’un bas lambris façon chêne qui s’harmonise avec les buffets de chêne massif est meublé de deux buffets. Celui de gauche comporte quinze casiers numérotés où chaque employé pouvait conserver ses affaires personnelles : serviette, bol, médicaments… Jusqu’en 1925, elle accueillait de douze à quinze personnes, notamment le maître d’hôtel, assisté d’un second, un ou deux valets de chambre, des valets de pieds, le chef cuisinier, l’aide cuisinier, un homme de peine, une lingère, un jardinier, puis les postes de valets de pied, homme de peine, garçons d’office, de cuisine et laveurs sont peu à peu supprimés.

Dans la cuisine entièrement carrelée, du sol au plafond, pour des raisons d’hygiène, l’installation d’un double plafond a été conçu pour isoler de la chaleur et du bruit la salle à manger située à l’étage du dessus. Dans les grandes demeures, le grand nombre de domestiques nécessaire pour faire fonctionner et entretenir les fourneaux a contribué à ce que l’aménagement et l’outillage de la cuisine conservent un caractère archaïque. De même, la tradition culinaire recommandait l’utilisation de casseroles de cuivre et la cuisson sur les fourneaux de fonte réputée de bien meilleure qualité à celle des cuisinières fonctionnant au gaz ou à l’électricité. Toutefois, le progrès n’est pas absent et dès l’origine une cuisinière à gaz servait à confectionner la pâtisserie.

La table dressée dans la salle des gens
La table dressée dans la salle des gens
© Sophie Motsch

À proximité de la cuisine, communiquant directement par un passe-plat, se trouve la salle à manger des domestiques dite « salle des gens ».

Les plus jeunes habitent les logements du dernier étage des communs tandis que les autres domestiques sont logés dans l’hôtel même, à l’étage des combles, dans de grandes chambres avec cabinet de toilette particulier et un bain commun. Signe de modernité et de confort, un ascenseur dans la cage de l’escalier de service distribue tous les étages.

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Pratique

Musée Nissim de Camondo
63, rue de Monceau
75008 Paris

Métro : Villiers, Monceau
Tél. : 01 53 89 06 50 ou 06 40 (boîte vocale)

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