En 2019, dans le cadre de la rénovation de l’aéroport d’Orly, le Groupe ADP (Aéroports de Paris) renouvelle les enseignes lumineuses des aérogares et donne au musée des Arts décoratifs quatre lettres issues des enseignes originelles formant le mot Orly, témoignage monumental et exceptionnel du travail du typographe Adrian Frutiger.
Né à Unterseen dans le canton de Berne, Adrian Frutiger (1928-2015) est une figure majeure dans le paysage de la typographie européenne entre 1960 et 1990. Il est à l’origine d’un grand nombre de polices de caractères (Univers, OCR-B, Métro Alphabet, Paris, Avenir, Frutiger Stones) dont certaines sont toujours visibles aujourd’hui, sur les panneaux autoroutiers, dans le métro parisien ou sur certains documents administratifs.
En 1959, alors qu’il travaille pour le typographe et entrepreneur Charles Peignot (1897-1983), ami du directeur de l’aéroport d’Orly, Frutiger se voit confier la création d’une typographie en prévision de l’ouverture de la nouvelle aérogare dont les travaux sont conduits depuis 1957 par l’architecte Henri Vicariot (1910-1986). Frutiger développe ce qu’il appellera l’“Alphabet Orly” à partir des caractères typographiques « Univers » imaginés par lui-même entre 1952 et 1956 pour répondre à la demande de Peignot qui venait d’introduire en Europe le procédé moderne de photocomposition des textes.
Adaptable à tous les systèmes de composition, l’“Alphabet Orly”, avec son interlettrage particulièrement large et sa casse sans empâtement, aérée et marquée par un léger contraste entre les pleins et les déliés, permet de composer une écriture aussi évidente qu’efficace. Pour l’œil du voyageur, dans la géographie particulièrement complexe et démesurée de l’aéroport, les lettres lumineuses forment des mots immédiatement lisibles et signalent de façon intelligibles l’espace des deux aérogares, Orly sud (ouverte en 1961) et Orly Ouest (ouverte en 1971). Tout en témoignant du premier chantier d’envergure qui fut confié au typographe, ces lettres représentent l’aboutissement du travail que Frutiger développe pour l’ensemble de la signalétique de l’aéroport à partir des années 1960.
L’entrée de ces quatre lettres dans les collections du département Design graphique et publicité du musée des Arts décoratifs permet d’ajouter le nom de Frutiger à ceux de l’école Suisse déjà représentés dont notamment Roger Excoffon (1910-1983), Jean Widmer (né en 1929) ou encore Peter Knapp (né en 1931).