La marquise de Païva, célèbre courtisane, née Thérèse Lachmann à Moscou en 1819, arrive à Paris vers 1840. Elle défraye la chronique par son ascension fulgurante dans la société parisienne. En 1855, après avoir amassé une solide fortune et alors qu’elle est l’amante d’un jeune Prussien richissime, le comte Guido Henckel von Donnersmarck, elle commande un somptueux hôtel particulier sur les Champs Elysées à l’architecte Pierre Manguin. Ce dernier lui propose une demeure dans le goût Renaissance et dirige ce chantier complexe avec une équipe de jeunes et brillants artistes, dont Paul Baudry, Albert-Ernest Carrier-Belleuse, Jules Dalou, etc. Dix ans plus tard, en 1856, l’hôtel est achevé au prix de dépenses somptuaires. Après le décès de la marquise de Païva, le comte Guido vend l’hôtel en 1893. Il est transformé en restaurant de cuisine russe, jusqu’à ce que le Travellers l’achète en 1923.
En 2010, à la demande que le Travellers adresse au MAD, une étude scientifique de l’hôtel est lancée et aboutit à l’ouvrage publié par Les Arts Décoratifs et cofinancé par le Travellers, L’extraordinaire hôtel Païva, rédigé sous la direction d’Odile Nouvel-Kammerer. Pour mener à bien ce travail, la source la plus fiable a été l’important ensemble de photographies réalisées par Pierre Manguin lui-même, pendant la construction de l’hôtel. Cette inestimable documentation d’environ 300 clichés, mêlant tirages papier et plaques de verre, a été donnée par les descendants de Manguin, Paul Bobigny et Marie Loiseau, au Musée des Arts Décoratifs en 1919. Ces photographies révèlent la méthode de travail de Pierre Manguin. Elles sont mises en ligne ici, et permettent de faire une visite de l’hôtel, accompagnée d’un commentaire succinct.
En revanche, l’ouvrage permet une approche plus approfondie de l’hôtel et donne les clés de compréhension du programme décoratif, les noms des artistes et des manufactures qui ont été sollicités, la transcription des commandes et descriptifs d’époque, et enfin les photographies inconnues jusque là de la marquise de Païva, retrouvées dans les archives privées du prince Henckel von Donnersmarck.