La nef et ses deux bas-côtés permettent aux designers trois approches de leur travail : au centre, la mise en œuvre d’une installation dans un très vaste espace architectural ; côté jardin, la réflexion autour du bureau et de l’espace de travail ; côté Rivoli, une approche plus intimiste intégrant le processus de création.
Dans la nef, sous une voûte textile de 12 mètres de haut, Erwan et Ronan Bouroullec ont choisi de mettre en scène un paysage abstrait structuré par leurs nombreuses cloisons (Algues, North Tiles, Twigs, Clouds). Celles-ci morcèlent l’espace sur toute sa hauteur et dessinent le sens de la visite. Le public pénètre dans cet univers monumental et surprenant, imprégné d’une atmosphère singulière. Comme un écran ajouré les Nuages en polystyrène ouvrent l’exposition tout en laissant la perspective ouverte. Entre les cloisons, des podiums en carrelages Pico édités par Mutina permettent de disposer certaines de leurs créations : tapis Losanges pour Nanimarquina, mobilier Assemblages pour la Galerie kreo... Ces confrontations jouent sur les changements d’échelle tout en mettant en valeur l’aspect sensuel et délicat des pièces. Les Algues laissent entre-apercevoir le Textile Field, créé à l’origine en 2011 pour la salle des cartons de Raphaël du Victoria et Albert Museum. Comme un temps de pause, cette pièce sur laquelle le visiteur peut s’allonger, invite à la contemplation.
Côté jardin des Tuileries, les Bouroullec mettent en scène leur réflexion sur l’univers du travail initié avec les bureaux Joyn pour Vitra, qu’ils poursuivent avec cet éditeur à travers de toutes récentes créations : Workbay et Corktable. De même, le mobilier Copenhague édité par Hay est tout particulièrement imaginé et créé pour la nouvelle université de Copenhague. Leurs préoccupations en matière de bureau prennent en compte de manière très pragmatique les évolutions les plus récentes dans la façon de travailler : seul, à plusieurs, nécessitant des espaces intimes propices à la concentration ou au contraire plate-forme collective. Les visiteurs pourront tester l’ergonomie et l’usage de ces pièces en expérimentant ce mobilier. Là encore, l’espace est délimité grâce à un nouveau système de rideaux mis au point avec Kvadrat et tout nouvellement édité, les Ready made curtain, très légers et prêts à poser. 300 dessins abstraits, libres ou appliqués à une recherche précise sont présentés tout le long de cette galerie.
Côté Rivoli, les six alcôves présentent des objets dans un rapport à l’espace plus domestique et plus intime. Les pièces sont choisies pour dialoguer entre elles et sont contextualisées avec des maquettes et une constellation d’images. Dessins préparatoires, photos d’usine ou de détails de pièces décrivent ainsi en filigrane le processus de création.
En quinze ans, les Bouroullec ont développé une œuvre particulièrement prolifique dans un style toujours simple et fonctionnel. Que ce soit dans les meubles, objets, cloisons, ils cherchent à apporter des solutions nouvelles aux modes de vie de leurs contemporains. Ils sont, très intéressés par les problèmes d’espace et de modularité. Ils travaillent ainsi souvent à l’échelle de l’architecture. Une de leurs premières pièces, le Lit clos, créé en 2000 pour le Salon du Meuble de Milan, est imaginé pour des personnes qui vivent dans une seule et même pièce. En 2007, l’Alcove Sofa pour Vitra tient autant du canapé que de la cloison. Leurs multiples parois peuvent être construites en assemblant soi-même des éléments modulaires : les modules Cloud (Cappellini) sont à la fois étagères et cloisons, les Algues (Vitra) et les Twigs (Vitra) permettent de créer des claustras aérés tandis que les North Tiles (Kvadrat) et les Clouds (Kvadrat) apportent un grand confort acoustique.