Né en 1963, Francois Azambourg étudie
à l’École régionale des beaux-arts
de Caen puis intègre l’École nationale
supérieure des arts appliqués et des
métiers d’art – Ensaama. Il fonde ensuite
son propre studio de design à Paris
et multiplie depuis les collaborations
avec le CIAV (Centre International d’Art
Verrier), mais aussi Hermès, Ligne Roset,
la Manufacture de Sèvres, Louis Vuitton,
Cappellini, Poltrona Frau, la Galerie kreo…
Il est lauréat du concours du musée des
Arts décoratifs en 1985, de la Fondation
de France en 1988, de la Fondation
de la Vocation en 1993, de la Villa Médicis
hors les murs en 2003, du Grand Prix
du Design de la ville de Paris en 2004
et de la Villa Kujoyama en 2015.
Ses œuvres sont présentes dans les
collections publiques d’institutions
prestigieuses comme le Centre
Pompidou, le musée des Arts décoratifs
ou le CNAP. À cette reconnaissance
artistique s’ajoutent les liens étroits tissés
entre le designer et le musée des Arts
décoratifs qui a acquis ces dernières
années des œuvres emblématiques
telles que le fauteuil en bois fendu réalisé
en 2015 au retour de sa résidence à la Villa
Kujoyama, mais aussi des vases en verre
soufflé-moulé de la série Douglas.
L’œuvre du designer, pléthorique, rayonne
et se disperse dans tous les champs
du design.
Dans chacun de ses projets, François
Azambourg agit avec vérité. Son design
interroge, interpelle. Il offre à voir au-delà
de l’œuvre jusqu’à rendre lisible
la structure même de l’objet. Designer
de la transparence, il ne cache rien.
Tout est dit. Tout est montré.
Le parcours, thématique, recense
l’essence même de son travail depuis
les origines de ses créations jusqu’à
la question industrielle, en passant par
l’expression plastique, le lieu comme
source d’inspiration, le rapport à l’artisanat
ou encore l’expérience du vivant.
Le monde de l’enfance et l’imaginaire
introduisent ce parcours. Le visiteur
y découvre à travers les premières
créations du designer, son attrait pour les
avions, les oiseaux, le monde du vivant
ou encore la technique. Il développe
déjà, sans le savoir, une méthodologie
de création, un rapport à la matière qui
passe par l’exploration et la manipulation.
Il lit, se documente, reproduit, construit
des maquettes, décortique les systèmes
mécaniques. Il s’intéresse à la résistance
des matériaux, à la triangulation, des
notions qu’il ignore encore mais qui
le fascinent déjà. Sont réunis ici croquis,
dessins, maquettes et documents
dévoilés comme autant de témoignages
de ces mondes qu’il construit enfant.
L’exposition revient sur une autre de ses
passions, la musique, omniprésente.
C’est pour elle qu’il consacre, dès
1985, l’une de ses premières créations :
un saxophone allégé. Grâce à un nouveau
bec, un mécanisme original de tringlerie
inspiré du monde de l’aviation,
il révolutionne l’ergonomie de l’instrument
et ainsi la mobilité du musicien.
La suite du parcours s’intéresse aux
expérimentations et aux techniques
inédites, propres au designer : structures
légères et triangulées, « sandwiches »
souples. Sont exposées des pièces
de mobilier devenues iconiques
comme la chaise Very Nice (2001)
en balsa qui ne pèse pas plus de 700 g.
Le matériau est ici travaillé comme
une architecture d’aile d’avion, à partir
de structures triangulaires, recouvertes
de film polyester.
L’exposition révèle, dans un autre
projet, son travail sur l’association
et la combinaison des matériaux. Chaises,
tables, fauteuils, mais aussi bagagerie
pour Hermès sont composés de ce que
le designer nomme un « sandwich
souple », soit une mousse molle prise
en étau entre deux éléments de bois
ou de cuir. Les objets et les pièces
de mobilier se déploient alors tout
en souplesse.
Du prototype aux tentatives avortées
jusqu’au résultat final, c’est tout
le processus de création qui est ici
dévoilé. Il aboutit d’ailleurs souvent
à ce qu’il nomme des « loupés », des
« ratés », qui deviennent finalement source
d’inspiration pour retravailler la matière,
l’alléger plus encore, la révéler enfin.
François Azambourg ne cesse
de s’interroger sur la flexibilité
de l’industrie. Produites sans moules
ou en corps creux, ses créations
s’émancipent des techniques
traditionnelles telle la chaise en textile
Pack (1998), gonflée de mousse
polyuréthane. Lieu de réflexion,
le design lui permet d’explorer le monde,
de développer de nouveaux champs
opératoires. L’artisanat devient pour lui
un laboratoire de l’industrie. En 2006,
il se confronte à la tôle et imagine
un nouveau patron, de métal cette fois-ci,
qu’il gonfle de mousse. Trop expansée,
celle-ci envahit tout le vide faisant
craquer les soudures et froisser l’acier.
Ainsi naît la chaise Bugatti, d’un autre
« loupé », qui sera déclinée dans toutes les
couleurs des grandes marques de voitures
de course italiennes.
Froissage, pliage, le designer aime
contraindre la matière. Dans la lignée
de Serge Mouille et de ses formes
en métal déployé, il conçoit, dès 2008,
des sièges en grillage. À l’instar des
origamis, en choisissant de travailler
le grillage par pliage, il en réinvente
l’expression plastique.
Le parcours se poursuit avec la relation
que François Azambourg noue avec
le lieu de création. C’est précisément
le cas lorsqu’il réalise le vase Douglas
avec le Centre International d’Art
Verrier de Meisenthal situé dans
les Vosges. Soufflé dans un moule
conçu en bois de Douglas, le vase
prend la marque du veinage de celui-ci,
exprimant alors l’empreinte même
de la nature environnante.
Les vases sont semblables mais tous
uniques, portant la trace du vivant,
le caractère du génie du lieu. Quand,
en 2015, il s’envole pour le Japon
et s’installe en résidence à la Villa
Kujoyama, il s’empare du même esprit
du lieu et cherche, comme à Meisenthal,
à sonder le langage du bois. Il s’intéresse
aux rebus de fabrication, les copeaux
de bois, qui deviennent sa matière
de prédilection. Par tissage, tressage,
collage, il compose des objets d’une
légèreté absolue et ses créations
l’amènent à une nouvelle réflexion sur
le bois : le bois fendu.
L’exposition explore également les liens étroits
qu’il entretient avec le monde du vivant,
source infinie d’inspiration. Il observe
la vie des termites et des abeilles
comme celle des machines. Il est l’un
des pionniers dans ce domaine lorsqu’il
utilise, dès le début des années 2000,
le potentiel du nid d’abeilles (2005).
Le musée des Arts décoratifs, qui
conserve et expose l’une des plus riches
et plus anciennes collections de design
en France, est heureux de présenter
au public cette monographie d’envergure
consacrée à François Azambourg.