Cet objet illustre magnifiquement le degré perfection de la production de porcelaine durant le règne de Yongzheng (1723-1735) de la dynastie Qing (1644-1912). Il est également révélateur des échanges culturels et artistiques qui se sont opérés entre la Chine et le monde islamique.
Grand amateur d’art, l’empereur Yongzheng appréciait particulièrement les modèles de la dynastie Ming (1368-1644). Cet objet s’inspire d’une forme produite dans les fours de Jingdezhen sous le règne de Xuande (1426-1436), tout comme la technique de décor en bleu de cobalt, rehaussé de points plus foncés. Ici, forme et technique sont poussées à la perfection.
Destinée au service ou à la consommation des boissons, cette verseuse (ou pichet) à une seule anse et dépourvu de pied tient sa forme d’un modèle de hanap (mashraba) d’Asie centrale, utilisé dans le monde islamique. Des objets similaires ont été produits, entre autre, dans la région d’Hérat (Afghanistan) tout d’abord en terre cuite (XIIe-XIIIe siècles), puis en alliage cuivreux incrusté, ou en jade blanc ou vert épinard notamment au XVe siècle, et encore dans le monde ottoman au XVIe siècle.
La marque impériale en six caractères inscrite dans un double cercle bleu est tracée dans une calligraphie de style régulier (kaishu). La présence du bleu de cobalt est contrastée. Sur le col, il est intensément présent alors que le blanc et le bleu s’équilibre harmonieusement à l’endroit où la panse s’élargit. Le rinceau de fleurs de diverses variétés (lotus, camélia, chrysanthème, pivoine) s’épanouit en occupant parfaitement la surface disponible. Le blanc du fonds est rendu légèrement bleuté par la couverte, autre caractéristique des porcelaines de la période Yongzheng. L’épaisseur du corps de l’objet est à la fois régulière et assez mince, de même que l’anse qui est affinée au maximum jusque dans son attache basse ajourée. La panse a la forme presque complète qu’une sphère. Ces éléments confèrent à cette œuvre des proportions parfaitement harmonieuses, plus encore que celles du modèle Ming.