
Dans la culture occidentale, le vêtement est intimement lié au péché originel. Pour cette raison, il se devait d’être le plus sobre et le plus discret possible. Des conseils, des règlements, des lois ont été édictés au cours des siècles par les pouvoirs religieux et civils pour imposer cet idéal de sobriété et de discrétion dans les formes, les ornements, les couleurs, et fustiger les extravagances vestimentaires vues comme des péchés d’orgueil ou d’impudicité. Des documents conservés au Archives nationales en témoignent comme L’Ordonnance de Charles VIII datant de 1485 interdisant le port du velours et des draps de soie dans les habillements, sauf aux nobles. Dans ce texte, il est indiqué que hors les princes de sang et gens du grand conseil, il est interdit de porter des draps d’or et d’argent sous peine de confiscation de l’habit. Selon le roi, enfreindre ces lois est « desplaisans à Dieu ». Pourtant les transgressions restent nombreuses.
On retrouve le même type de texte au XVIIe siècle concernant la dentelle, dont la prouesse technique d’exécution fait d’elle un symbole de luxe. Inventée en Italie, les dentelles au point de Venise sont fort appréciées par la noblesse qui n’hésite pas à dépenser sans compter. Le pouvoir s’inquiète de cette fuite des devises à l’étranger. Afin de protéger l’économie du pays, des « déclarations » sont promulguées à partir de 1629 afin de limiter le port de la dentelle mais surtout son importation. Si les lois somptuaires et autres édits, imposent une manière de se vêtir, certains ouvrages prodiguent des conseils. En effet, le vêtement exige une certaine conduite. Depuis la publication, en 1530, de La Civilité puérile d’Erasme (un traité sur l’éducation des enfants dans lequel le vêtement fait l’objet d’un chapitre), des milliers de traités de civilité clament la discrétion vestimentaire comme une part essentielle de la maîtrise de soi. Le XIXe siècle marque un tournant avec l’apparition des guides ou manuels devant servir l’élégance bourgeoise, dont les ouvrages de bonnes manières publiés de nos jours sont les héritiers directs. Aujourd’hui, les magazines, les émissions télévisées et les blogs dispensant des conseils sur le savoir-se-vêtir en toute circonstance se multiplient.