Jean-Vincent Huguet (Paris ?-Paris ap. 1790), vers 1770
Cuivre, argent, vernis, bois noirci et doré, rehauts de dorure
Poinçon de maître orfèvre : J V H, un calice, une fleur de lys couronnée entre deux grains de remède
Poinçon de proportion : A G encadrant 1/6 surmonté d’une fleur de lys couronnée
H. 0,235
Acquis grâce au mécénat de Mme du Breuil
Inv. 2007.66.1

Cette verseuse en métal doublé et laqué a été produite vers 1770 par l’orfèvre Jean-Vincent Huguet, reçu maître orfèvre à Paris en 1745. Cet orfèvre, à la production classique, s’intéressa durant les décennies 1760-1770 à la technique du doublé inspiré du plaqué anglais et pratiquée par deux hommes, un ingénieur Jean-Baptiste Gournay et un orfèvre parisien Alexis Micalef, qui avaient obtenu l’autorisation d’ouvrir en 1768 une manufacture de platerie de cuivre doublé d’argent. Cette technique qui n’est ni un alliage de métaux ni un procédé d’argenture, consistait à appliquer une feuille d’argent sur une feuille de cuivre par simple pression à chaud, sans soudure, afin d’obtenir une feuille faite des deux métaux superposés, qui était ensuite travaillée au marteau ou emboutie. Les surfaces en contact avec les aliments étaient obligatoirement en argent, l’extérieur était le plus souvent recouvert d’un vernis soumis à cuisson, de couleur noire, blanche ou « bleu céleste », à décor de fleurs ou de chinoiseries. La proportion cuivre/argent pouvait varier de 1/6 à 1/4 et devait figurer sous forme d’un poinçon particulier appliqué à ce type d’ouvrage composé des lettres AG pour argent séparées par l’indication de la proportion d’argent employée sous une fleur de lys couronnée. En 1769, Huguet obtenait par lettres patentes l’autorisation d’ouvrir à son tour une manufacture « de vaisselle de cuivre et d’argent fin unis ensemble sans soudure ». Sa production consista surtout en pots à eau, verseuses, théières, cafetières, chocolatières, quelques terrines et leurs plateaux, batterie de cuisine et beaucoup plus rarement de platerie. Son établissement situé à l’hôtel de Fère, rue Beaubourg, eut toutefois une existence éphémère. En 1772, il fut contraint de le fermer étant à la fois aux prises d’une rivalité sans concession de la part de son confrère Micalef mais également parce que la technique mise en œuvre et le décor au vernis n’étaient pas sans incidence sur le prix de l’objet à bon marché que Huguet prétendait produire, le doublé restant un produit onéreux. De ce fait, la production de pièces en métal doublé recouvertes de vernis resta modeste. Les musées français conservent peu de pièces de Jean-Vincent Huguet, cette acquisition est surtout l’occasion d’enrichir les collections du Musée des Arts Décoratifs d’un exemple de cette technique originale, représentative des recherches menées par les artisans français durant les décennies 1760-1770.

Je remercie Michèle Bimbenet-Privat de m’avoir communiqué ses recherches sur la manufacture de Huguet.

Anne Forray-Carlier

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